Nous voici au troisième rendez-vous du Curious Live, l’émission créée par les étudiants du master MASCI sur le thème du patrimoine en Bourgogne.
Cette fois-ci, Etienne et Camille sont accompagnés de Léa, Judith et Mathilde afin de comprendre les nouveaux enjeux de la communication dans le monde du vin.
Le vin, un secteur en pleine transition
Aujourd’hui, le vin fait partie intégrante du patrimoine de la région, renommé dans la France entière mais pas seulement puisque notre cher vin bourguignon a aussi l’honneur d’être connu et reconnu à l’international.
Cependant, le secteur du vin est affaibli par une concurrence croissante, une baisse de la consommation des Français et par des lois drastiques qui touchent la production et la communication. Néanmoins, la France reste le premier pays producteur et exportateur de vin dans le monde. Le vin français est perçu comme une référence à travers le globe.
La place du marketing et de la communication dans le secteur du vin est grandissante. Son intérêt n’est plus à prouver. Les professionnels du secteur ont bien saisi que la grande qualité de leurs vins ne suffit plus pour vendre. Au-delà de l’étiquette, les professionnels du vin ont investi dans des sites internet, des e-boutiques ou des blogs. Nombreux sont ceux qui ont commencé à utiliser Facebook et les réseaux sociaux pour fidéliser leurs clients. Les fiches produits, les présentations du domaine, de la gamme sont devenues le fruit de jolies créations artistiques. Les supports de communication externes ont été mis en forme. Photos, vidéos : les formats se diversifient.
On constate donc une évolution notable dans tous les bassins de production vitivinicole. Si la Champagne était autrefois la grande dame du marketing du vin, toutes les régions se sont fortement dynamisées en termes de communication. Le Vin permet de transmettre ces valeurs grâce à l’émotion, l’expérience vécue et le partage. L’œnologie est donc un vecteur de communication à part entière. C’est également à l’épicentre de la gastronomie, du patrimoine culturel et du savoir vivre. De plus en plus de personnes, tant femmes qu’hommes, sont à la recherche de ces valeurs et de ces racines culturelles.
Au cœur du patrimoine bourguignon
Les vins bourguignons constituent l’une des fiertés de la région. En effet, connus et reconnus à l’international, ils enrichissent le patrimoine de la Bourgogne. Ainsi, de nombreux événements sont organisés annuellement dans la région pour continuer de le faire rayonner à travers le monde et attirer les amateurs et professionnels du vin chaque année. Voici quelques uns des plus connus :
En amont de la vente aux enchères des Hospices de Beaune, la Confédération des Appellations et des Vignerons de Bourgogne (CAVB) organise la 148ème Fête des Grands Vins de Bourgogne, au Palais des Congrès de Beaune les 19 et 20 novembre prochain. Elle est à la fois considérée comme la plus grande dégustation de vins de Bourgogne au monde et « la plus ancienne des manifestations viticoles » d’après la CAVB, son organisatrice.
La Bourgogne, c’est 84 appellations et il est bien rare d’avoir accès à l’ensemble de celles-ci en une seule manifestation ! Toutes les appellations de la Grande Bourgogne, de Chablis au Beaujolais en passant par les Grands Crus de la Côte d’Or, sont proposées à la dégustation au même endroit. Les amateurs, comme les professionnels du vin, pourront déguster plus de 3000 vins différents et des références d’ordinaire inaccessibles. C’est une occasion unique de découvrir ou de redécouvrir la magie des terroirs bourguignons.
Un autre événement emblématique, les enchères des Hospices de Beaune. Ce lieu chargé d’histoire et d’émotions a été choisi par l’Élysée pour marquer le dernier voyage officiel en France d’Angela Merkel en tant que chancelière allemande. Cette année, la plus ancienne et la plus renommée au monde des ventes aux enchères de vins de Bourgogne se déroulera le troisième dimanche de novembre. Cela marquera ainsi la fin du cycle viticole et des vinifications de nos grands vins de terroirs. Avec ses 50 cuvées, la vente des vins permet non seulement de récolter des fonds importants pour l’amélioration des équipements médicaux et la modernisation des infrastructures de l’institution hospitalière sur le territoire du Sud Côte-d’Or mais aussi pour l’entretien et la conservation de son patrimoine.
Tout particulièrement apprécié des grands passionnés du vin, le Bourgogne Gold Tour permet aux amateurs de vin français mais aussi internationaux de profiter d’un voyage immersif au cœur du terroir bourguignon. Les prestations sur mesure donnent lieu à des moments uniques et authentiques, comme par exemple déguster de manière privée des vins d’exception avec un guide bilingue, se déplacer en véhicule de prestige ou encore survoler les vignes en montgolfière ou en hélicoptère.
Connue à l’international, la route des vins de Bourgogne offre 220 kilomètres de coteaux répartis en plusieurs parcours. En vélo, en moto, en voiture, en camping-car ou encore en randonnée à pied, ces itinéraires vous permettront d’explorer le riche patrimoine Bourguignon et de visiter de nombreuses caves, domaines viticoles et châteaux. Vous aurez ainsi l’occasion de rencontrer des petits producteurs mais aussi des maisons à forte notoriété sur la route des grands vins de Bourgogne, surnommée «la Route des grands crus ».
L’OIV, “l’ONU du vin”, pose ses valises en Bourgogne
L’Organisation Internationale de la vigne et du vin (OIV) est l’organisme intergouvernemental à caractère scientifique et technique de compétence reconnue dans le domaine de la vigne et du vin. La France, qui en est l’État-hôte depuis sa création en 1924, a ainsi proposé de déménager son siège de Paris, où ses locaux étaient trop exigus, et de l’installer en région. En juin dernier, face à des villes concurrentes comme Bordeaux ou Reims, la ville de Dijon proposait sa candidature pour accueillir l’OIV. Une candidature par ailleurs soutenue par le gouvernement et qui a été “très bien accueillie” selon M.Lemoyne, secrétaire d’État au tourisme. Une quarantaine des représentants des États-membres de l’OIV sont même venus visiter l’hôtel particulier Bouchu d’Esterno, proposé pour abriter l’organisation et situé à quelques centaines de mètres de la future Cité internationale de la gastronomie et du vin, qui doit ouvrir ses portes en avril prochain.
La nouvelle est annoncée le 25 octobre : les représentants des Etats-membres de l’Organisation internationale de la vigne et du vin se sont réunis et l’organisation s’installera donc bien dans la Cité des ducs à l’horizon 2024.
L’Assemblée générale de l’OIV, en choisissant Dijon, reconnaissait un dossier construit en bonne intelligence entre François Rebsamen et l’ensemble des acteurs du territoire. “C’est un moment historique qui va renforcer l’image internationale de la Région et de Dijon dans le domaine viti-vinicole. Avec la Cité internationale de la gastronomie et du vin, nous avons maintenant un pôle mondial de la vigne et du vin. Cela sera aussi un atout pour le tourisme d’affaires, permettant de renforcer l’attractivité de la métropole et sa fréquentation hôtelière”, se réjouit Marie-Guite Dufay, présidente de la région.
L’importance du digital
On comprend donc qu’en Bourgogne, le vin occupe une place importante. Cependant, force est de constater qu’il s’agit également d’un univers ancestral et régi par de nombreuses règles commerciales, graphiques et communicationnelles. Le numérique offre aujourd’hui de réelles possibilités. Après une période de questionnement sur l’utilité réelle du digital dans le secteur viticole, la crise sanitaire et les confinements à répétition ont poussé les derniers acteurs réticents à franchir le pas afin de continuer à transmettre leur image, leurs valeurs et à échanger avec les clients.
Mais comment se démarquer à l’heure du digital ?
La communication digitale est urgente, mais elle ne doit pas être faite avec précipitation. Une image de marque se crée sur le long terme et doit être pensée comme un moyen de se différencier. Sur internet, les marques de vin peuvent rapidement se ressembler. Pour se démarquer, il faut alors combiner intelligemment l’authenticité d’une rencontre physique à un support digital, où la communication se fait souvent à sens unique.
Pour se différencier, l’identité visuelle est l’une des premières clés. Elle reflète directement l’image de la marque et fait passer des messages aux consommateurs. Pourtant, les différents domaines viticoles peinent à communiquer créativement car ils sont restreints par un marché exigeant, la loi Evin et par l’internationalisation du secteur. De ce fait, très peu de vignerons osent prendre de vrais partis pris et se contentent la plupart du temps de communiquer de manière opérationnelle, ce qui développe une certaine universalité entre les marques.
En ligne, l’identité visuelle est un pilier pour cette différenciation. Mais assumer une communication visuelle créative dans un secteur qui possède une histoire et un marché codifié et réglementé demande beaucoup de réflexion.
« Cela va aussi dépendre de la région : le vin Bordelais est ultra innovant. A l’inverse, la Bourgogne est un peu en retard, mais a-t-elle vraiment besoin de communiquer finalement ? », explique Elise Jager.
Sur la scène internationale
A l’international, les codes de la tradition française garantissent une image positive et premium. Les marques avec une grande part d’exportation peuvent alors facilement jouer avec les stéréotypes français et les codes des maisons de vins prestigieuses : le nom “Domaine” peut d’ailleurs suffir pour persuader les futurs acheteurs.
Laisser place à l’émotion : le storytelling
“Le storytelling, l’art de raconter une histoire à des fins de communication”. Son utilisation est de plus en plus fréquente dans la stratégie des marques de luxe. Cela permet de communiquer son identité tout en faisant appel à l’émotion et aux notions de ressenti. Grâce à la singularité et la rareté des produits du secteur viticole, cette méthode est idéale pour se démarquer de ses concurrents et raconter sa propre histoire. Elle est aussi facilement adaptable au digital, où les consommateurs souhaitent accéder à l’information facilement et s’imprégner de l’univers d’une marque.
« L’intérêt de la communication est de retranscrire l’histoire unique de chaque vin. », Elise Jager.
Cela consiste donc à utiliser une histoire plutôt qu’à mettre classiquement en avant des arguments marque ou produit. Cette technique permet de capter l’attention, de susciter l’émotion, de travailler la personnalité de marque et, selon certaines études, de favoriser la mémorisation. Elle peut également être utilisée pour élever la marque à un rang de mythe. Le storytelling peut ainsi s’inspirer d’histoires réelles (mythe du fondateur ou de la création d’entreprise) ou créer des histoires imaginaires liées à la marque ou au produit.
L’usage global du storytelling est notamment utilisé dans le domaine du luxe à travers le storytelling de marque. Une fois le storytelling mis en place, il est alors insufflé dans tous les supports de communication : du logo à l’étiquette, en passant par le site internet.
Au-delà du digital
L’une des erreurs que l’on pourrait faire est de penser qu’il faut tout miser sur le digital. Il est certes devenu un outil essentiel pour être visible et exister, mais afin de créer une réelle différence et marquer les esprits, il faut aller plus loin et développer une stratégie globale. L’ADN d’une marque doit se transmettre sur tous les supports comme un fil conducteur qui permet au client de vivre une expérience complète. Celle-ci doit se construire autour des sens, une notion que l’on retrouve dans la dégustation-même d’un vin. Dans le monde viticole : l’émotion finale se trouve dans l’essence même du produit : le vin, la dégustation. C’est la finalité de toute l’expérience. On dit souvent qu’un bon vin se suffit à lui- même et se passe de commentaire, mais il est difficile de dénier le rôle et l’impact de la communication lors de cette expérience.
Et l’influence dans tout ça ?
De nouveaux acteurs sont arrivés sur le marché du vin ces dernières années : les influenceurs. Ces leaders d’opinion vont partager leurs expériences à leur communauté à travers leurs réseaux sociaux. À l’heure où internet est au cœur de tout, il existe plusieurs catégories d’influenceurs. Les influenceurs dans le domaine du vin vont toucher une cible bien particulière, ce sont plutôt des jeunes, de 18 à 30 ans, les générations Z et les milléniaux, les consommateurs de demain.
Aujourd’hui, on estime que 36 % des grands acheteurs de vins (une à plusieurs fois par semaine) ont déjà rempli leur cave en se référant aux recommandations des réseaux sociaux et d’influenceurs. Ce chiffre ne fait qu’augmenter avec les années, ce qui devient très important pour les entreprises et les vignobles. Et nous le savons, un consommateur va faire confiance à d’autres consommateurs via des avis ou justement via des influenceurs, avant de passer à l’acte d’achat.
Pour conclure
Il n’existe pas à l’heure du digital de solution miracle pour se différencier, mais plutôt des réflexions, des outils et des stratégies à mettre en place qui, étape par étape, permettent à une marque d’être présente et d’avoir une image positive. C’est également affirmer sa différence en restant cohérent, trouver le juste équilibre, insuffler de la modernité tout en gardant l’âme d’une pratique ancestrale. Finalement, c’est peut-être aussi miser sur l’humain, le partage et avant tout, envisager le vin comme vecteur de plaisir.